Le salon des maires de Côte-d’Or sous le thème de la transition écologique

Le 21e salon des maires, organisé par l’association des maires de France de Côte-d’Or, se déroulera les 14 et 15 décembre prochains au Parc des Expositions de Dijon.

Pour l’occasion, nous avons rencontré Ludovic Rochette, président de l’AMF 21 et maire de Brognon depuis maintenant 26 ans. Entretien.

J’aime Dijon. Ce mardi 5 décembre au Tribunal Correctionnel de Dijon, se tenait le procès des agresseurs présumés du maire d’Ouges Jean-Claude Girard. Deux des prévenus ont été condamnés à huit mois de prison ferme, les cinq autres à de la prison avec sursis. Dans un contexte de hausse des violences exercées contre les élus, quel message envoie la justice ?

Ludovic Rochette. C’est un véritable signal de fermeté qui est envoyé de la part de la justice. Les peines requises par le Procureur de la République étaient très lourdes. Les peines retenues le sont également. Les sept prévenus ont tous été condamnés. Non seulement le maire a été reconnu comme victime, mais la commune aussi. C’est un jugement très important qui, deux ans après les faits, peut aider Jean-Claude Girard à tourner la page.

« Il faut montrer qu’il n’est aucunement possible de s’attaquer verbalement et/ou physiquement au premier magistrat de la commune, et par ailleurs à tout élu politique. »

Quelles solutions peuvent apporter les pouvoirs publics contre l’augmentation des agressions commises sur des élus, notamment des maires ?

Dans ce climat anxiogène de violences et de remise en cause de l’autorité par une infime partie de la population, le maire est « l’élu à portée de baffe » du fait de sa proximité. Ce constat impose des actions. Il faut aider les élus à se former contre cette agressivité qui peut désarçonner. Avec l’aide de négociateurs du GIGN, l’AMF a formé 150 maires en Côte-d’Or en leur apprenant les attitudes et les postures à adopter pour ne pas enflammer une situation qui serait déjà tendue. Mais parfois, aucune formation ne permet de faire face à la bêtise humaine. Il faut rappeler que le maire est une personne dépositaire de l’autorité publique tout comme le pompier, le gendarme, le policier et le magistrat, et qu’il dispose même du pouvoir de police. Il faut montrer qu’il n’est aucunement possible de s’attaquer verbalement et/ou physiquement au premier magistrat de la commune, et par ailleurs à tout élu politique.

Est-ce que vous allez aborder cette problématique lors du salon des maires ?

Cette année, le salon des maires aura pour thème la transition écologique. Mais si l’on veut que les maires soient pleinement concentrés dans l’exercice de leur fonction et la mise en œuvre des politiques, notamment celle-ci, ils doivent pouvoir travailler dans un climat serein. L’AMF travaille actuellement avec le ministère de la cohésion des territoires sur l’évolution du statut d’élu. On espère qu’une proposition de loi en résultera au printemps pour lui assurer un statut plus confortable.

La transition écologique sera donc le thème du salon des maires 2023. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Le salon des maires abordera plusieurs sujets : le principe de zéro artificialisation nette (ZAN), les zones d’accélération des énergies renouvelables (ZAER), la performance énergétique des bâtiments, etc… Mais si l’on veut que les maires réussissent la transition écologique, il faut s’assurer qu’ils aient les moyens humains, financiers et juridiques pour être les plus efficaces. Aujourd’hui, j’ai une inquiétude : la disparité entre les communes. Celles qui ont ces moyens ont tout en main pour bénéficier des subventions, et activer les investissements pour réussir la transition écologique. D’autres n’ont pas cette chance, et n’ont même plus suffisamment de ressources pour fonctionner. L’un des enjeux est de permettre à toute commune de rentrer de plein fouet dans la transition. Cela va sûrement nécessiter une nouvelle étape d’organisation des collectivités, de la fiscalité locale, ainsi que de la répartition des ressources, autrement dit la péréquation. Dans le cadre du salon des maires, les débats et conférences sont là pour faire remonter des propositions et renforcer la visibilité des initiatives locales auprès de l’État, des ministères et des parlementaires.

Les maires peuvent-ils apporter des réponses locales à une problématique mondiale telle que la préservation de l’environnement ?

Là où il y a une difficulté à trouver un consensus mondial en faveur de la protection de la nature, la France peut compter sur un réseau de 35.000 communes, dont près de 700 en Côte-d’Or, qui constituent de véritables leviers de proximité pour réaliser la transition écologique. Les maires n’ont pas attendu la COP 28 pour protéger leur foncier, moderniser l’éclairage public de leur commune, isoler et construire des bâtiments respectant le principe de l’éco-conditionnalité… Certes, la réussite de cette transition passe par le changement des mentalités, mais aussi par des initiatives locales et de proximité. Dans le département, les communes et les intercommunalités se sont regroupées au sein du SICECO, territoire d’énergie Côte-d’Or, un syndicat de l’énergie, pour mutualiser leurs efforts. Sans le soutien humain et financier de ce syndicat, je n’aurais pas pu changer aussi vite les lampadaires de ma commune pour des LED.

« Les communes sont des acteurs importants pour faire bouger les lignes. »

Le président de la République a annoncé un objectif de décarbonation et la territorialisation de la planification écologique avec la création, sur le modèle international, de conférences régionales dont celle de Bourgogne-Franche-Comté inaugurée aujourd’hui. Y participerez-vous ?

J’y serai et j’espère que beaucoup de villes y participeront. Ces réunions permettent d’adresser des messages très forts à la population et aux différents acteurs. Ils permettent aussi de montrer l’implication des collectivités dans l’investissement public, notamment dans la transition écologique. Les collectivités sont, d’ailleurs, sûrement dans les premiers volumes d’investissements de la transition écologique. De toute façon, il y a un réel besoin que les collectivités discutent entre-elles, ainsi qu’avec les entreprises et les associations. En Côte-d’Or, l’assemblée générale des maires et les collectivités ont la chance de pouvoir échanger avec un préfet ouvert au dialogue et qui entend leurs propos. La France a souvent été moquée pour le nombre de ses communes qui serait égal à celui du reste de l’Europe, mais en réalité il s’agit d’un véritable atout ! Les communes sont des acteurs importants pour faire bouger les lignes. On l’a vu durant la crise sanitaire et la relance, et on le verra durant la transition écologique.

La décarbonation de l’activité implique le développement des transports en commun et le passage à l’électrique. Quid de la mobilité en ruralité ?

D’un côté, il est impossible de se déplacer sans voiture et cela reste compliqué sans voiture thermique, aujourd’hui en ruralité. De l’autre, on assiste à un regroupement important de véhicules venant de l’extérieur en métropole. On ne peut pas faire de politique en ruralité sans améliorer la mobilité, mais l’urgence pour les territoires ruraux est telle qu’elle doit se faire en collaboration avec les autres territoires entre collectivités. L’AMF, à laquelle appartiennent quasiment tous les maires de Côte-d’Or, permet cet échange entre la ville et la campagne. C’est un lieu au sein duquel la parole est libre et où on laisse la politique à la porte.

Le salon des maires de Côte-d'Or sous le thème de la transition écologique
Crédit photo : Quentin SCAVARDO

D’ailleurs, le président de l’AMF, David Lisnard, vous avait confié une mission nationale sur le devenir des zones de revitalisation rurale (ZRR), dispositif visant à soutenir l’attractivité de la ruralité par des aides fiscales. Vous avez réalisé un rapport contenant 15 propositions pour moderniser le dispositif. Qu’en est-il ?

Je retiens deux motifs de satisfaction : les zones de revitalisation rurale ont été maintenues, même sous un autre nom, et seront territorialisées. Alors que l’on entend souvent parler de la politique de la ville, il s’agit sûrement là de la matérialisation d’une politique propre à la ruralité qui manque en France. Par contre, il faut que cette nouvelle politique concerne plus de territoires et de communes qu’aujourd’hui. Maintenant, c’est au législateur de déterminer les moyens financiers et les critères définitifs retenus pour ce dispositif.