« Une vie extra ordinaire », la nouvelle expo au jardin Darcy

Découvrez Une vie extra ordinaire, la nouvelle exposition photo que se tient du 23 mars au 22 avril sur les grilles du jardin Darcy. Aurore Pelissier met en avant les proches aidants, ces personnes qui consacrent leur vie au bien-être des proches, malades.

L’exposition qui se tient du 23 mars au 22 avril au jardin Darcy nous montre ce qu’on ne connaît pas : le monde des proches aidants.

Aurore Pelissier est à l’initiative de ce projet. Maître de conférence en économie à l’Université de Bourgogne, elle mène des recherches sur les conditions de vie des personnes qui aident leurs proches soufrant d’une maladie rare et invalidante et l’impact social et professionnel que cela peut engendrer. Ainsi, l’exposition est un beau pretexte pour mettre en avant ce statut trop méconnu. Aurore Pelissier a bien voulu nous éclairer sur le sujet et nous expliquer sa démarche.

Qu’est-ce qu’un proche aidant ? Quelles sont les difficultés associées à ce statut ?

Aurore Pelissier, maître de conférence à l'université de Bourgogne, est à l'initiative de la nouvelle exposition Une vie extra ordinaire au jardin Darcy
Crédit photo : Université de Bourgogne

Aurore Pelissier : Juridiquement, le proche aidant est une « personne qui vient en aide, de manière régulière et fréquente, à titre non professionnel, pour accomplir tout ou partie des actes ou des activités de la vie quotidienne d’une personne en perte d’autonomie, du fait de l’âge, de la maladie ou d’un handicap ».

L’aide peut engendrer des répercussions négatives sur la vie familiale (séparation, moins de temps pour les autres enfants), la vie sociale (moins de sorties, éloignement avec les amis), la vie professionnelle (diminution du temps de travail, difficile conciliation, arrêt), la situation financière et la santé des aidants (hausse du stress, de l’anxiété, problème de sommeil, problèmes physiques). Cela a été particulièrement observé chez les proches aidants de personnes âgées dépendantes ou dans des situations particulières type Alzheimer.

C’est une situation que l’on voit davantage grâce aux médias mais dont on ne connaît pas les conséquences dans la vie des aidants. Pourquoi avoir fait vos recherches sur les proches aidants ?

Peu d’études portaient jusque-là sur l’aide apportée par les parents aidants d’un enfant en situation de handicap, notamment dans le contexte particulier des maladies rares. C’est pourquoi, avec des économistes et des sociologues, nous avons développé le projet de recherche CASEPRA (qui a été lauréat de deux financements en 2020), pour investiguer de façon plus fine ce que signifie être parent mais aussi aidant de son enfant : un rôle relativement invisible puisque la frontière entre la parentalité et l’aidance est poreuse.

Nous avons mené plusieurs études de terrain pour répondre à des questions telles que : quelles sont les activités qui se rapportent à de l’aide qu’effectuent les parents ? Combien de temps les parents y consacrent-ils ? Cette aide est-elle différente d’autres formes d’aide apportée par d’autres proches, à d’autres aidés ? Ne suis-je pas dans mon rôle de parent lorsque je réalise des activités que l’on qualifie d’activité d’aide ? Où se situe la frontière entre les deux ?

Vous avez réalisé cette série de photos en collaboration avec Déclic Studio. Comment l’idée d’en faire une série photo vous est venue ?

Depuis le début de ce projet, nous avons développé des actions pour échanger avec les personnes concernées par les maladies rares et le grand public, pour mettre en perspective notre recherche et ses résultats. Nous avons notamment créé un blog et organisé deux ciné-débats. Dès le départ, j’ai souhaité qu’on aille plus loin dans notre démarche auprès du grand public, afin de rendre visible des situations invisibles et de permettre aux parents concernés de s’exprimer.

Les expositions sur les grilles du jardin Darcy sont très variées et permettent d’aller à la rencontre d’un vaste public : c’était une évidence pour nous. Il faut voir cependant que pour nous, c’est un gros défi. C’est la première fois en tant que chercheur académique que je monte ce type de projet. Traditionnellement dans mon métier, on publie des articles de recherches dans des revues spécialisées, on présente dans des conférences à nos pairs. Là, on va au-delà puisqu’on est dans la création artistique finalement.

« Je n’ai pas monté cette exposition seule, il y a toute une équipe que je remercie sincèrement et qui s’est investie très fortement… ».

Nous nous sommes inspirés des équipes du centre de génétique de Dijon, qui avaient déjà travaillé sur une exposition similaire : l’exposition Haut-delà des clichés. De ce fait, nous nous sommes dits que cette nouvelle expo sur les parents s’inscrivait dans cette continuité : après avoir mis à l’honneur les enfants, nous souhaitions mettre à l’honneur les parents. D’autant que la photographe Lætitia Devaux a de l’expérience, sur l’exposition précédente mais aussi de par son concept unique de mode thérapie : elle a tout de suite adhéré au projet et le jour J a su mettre à l’aise les familles durant le shooting photo.

Qu’est-ce que cela procure de voir ces œuvres visibles au grand public ?

C’est un grand moment d’émotion parce que ce projet nous tient énormément à cœur. Cela va bien au-delà de parler d’un projet de recherche qui serait transformé en exposition pour nous. D’ailleurs, il n’y a qu’un seul panneau sur le projet : ce que nous souhaitons vraiment c’est mettre en avant les parents et rendre visible ce qui finalement est invisible. Ces situations sont finalement peu connues du grand public même si le terme de proche aidant est aujourd’hui médiatisé et fait l’objet notamment d’un plan national d’aide aux aidants, lancé en 2019. Nous espérons que l’exposition va plaire aux parents qui se sont portés volontaires d’une part et puis qu’elle va susciter la curiosité du grand public. Au-delà, c’est aussi une façon de faire un lien avec la recherche à l’université.

Avez-vous d’autres projets à venir, avec la même démarche de mise en avant des personnes à la « vie extra ordinaire » ?

Cette exposition va sans doute poursuivre sa vie dans toute la France, par exemple dans les centres de génétique. Et puis nous souhaitons poursuivre l’organisation de nos ciné-débats et devrions bientôt pouvoir en proposer un nouveau à Dijon. Côté projet de recherche, le projet actuel se poursuit durant toute l’année 2023.

Actuellement, nous avons aussi un projet sur l’errance diagnostic dans le champ des maladies rares (financé par le Pôle de santé publique BFC) et nous sommes effectivement en train de développer d’autres projets qui visent toujours à mieux connaître les situations auxquelles font face les familles dans le but on l’espère d’accompagner la réflexion sur la mise en œuvre de politiques publiques adaptées.

L’exposiiton « Une vie extra ordinaire » à Dijon

Ne manquez surtout pas cette exposition, du 23 mars au 22 avril, sur les grilles du jardin Darcy, à Dijon.