Interview. Blue Fuji, la nouvelle pépite du rap dijonnais

Interview. Blue Fuji, la nouvelle pépite du rap dijonnais

Blue Fuji est l’artiste à suivre de la scène new wave. Le rappeur beatmaker dijonnais, qui a annoncé un partenariat avec le DFCO, vient de sortir son nouvel EP Jeune Hokusai, rendant hommage au football romantique et à son artiste japonais préféré : Hokusai. Entretien.

Entre Dr Dre, Eminem, Future, XXXTentacion, Juice WRLD, Trippie Redd, Claude Debussy, Érik Satie, Chet Baker, Nirvana et les Pixies, il n’a pas choisi. Comme son maître Hokusai, le jeune apprenti Blue Fuji puise dans ses influences multiples, son ressenti et sa créativité pour proposer un rap expérimental. Une écriture poétique, des sonorités vaporeuses et une mélodie contemplative, telle est la recette de son dernier EP Jeune Hokusai à retrouver sur les plateformes (suivre le lien). Grand amoureux du football romantique et des petits ponts, la nouvelle recrue du DFCO ne finit pas d’étonner par la multiplicité de ses passions et de ses talents.

J’aime Dijon. Quand est venue ta passion pour le rap ?

Blue Fuji. J’ai rencontré des potes au lycée qui m’ont fait découvrir des rappeurs comme Eminem et Lacrim. Avant, je n’étais pas passionné de rap, mais ils m’ont transmis leur passion comme s’ils m’avaient pris par la main en me disant « ça c’est la vraie musique ». J’ai d’abord écouté beaucoup de rap US, puis du rap français quand j’ai commencé à rapper un peu plus tard.

Quelles sont tes influences en rap américain ? 

Ce sont d’abord les beatmaker et producteurs qui m’ont influencé : Dr Dre avec son projet 2001, Timbaland, Kanye West… En old school, j’étais très friand de l’école Eminem et 50 Cent. Ça ne s’en ressent pas du tout dans mon rap d’aujourd’hui, mais j’en ferai le chemin jusqu’à on en entende les influences. Plus récemment, mes références seront plus des rappeurs comme Future, Lil Uzi Vert, et Lil Wayne qui est le père de cette génération ; mais aussi toute la génération SoundCloud avec XXXTentacion, Trippie Redd, Juice WRLD et ses sons très mélodieux. Et quand je parle de ces artistes-là, on commence doucement à comprendre les liens avec ma musique.

Et en rap français ? 

Je suis entré dans le rap français par l’écriture. Au tout début, j’écoutais des rappeurs très techniques comme Django et Nekfeu qui avaient une belle plume, mais aussi Lesram du Panama Bende, Limsa d’Aulnay… Avec le temps je me suis ouvert à la forme dans son ensemble, et je ne me suis pas seulement focalisé sur le texte. J’ai appris à apprécier des artistes comme 8ruki, Jwles, La Fève et le rappeur beatmaker H JeuneCrack. J’aime beaucoup l’état d’esprit de faire la prod, de créer sa propre musique, de la sampler et de rapper dessus. C’est quelque chose qui me parle ! Je ne produis pas encore tous mes sons, mais c’est mon objectif.

« Mon son est bon s’il me fait danser et ressentir des émotions, pas s’il y a de la connaissance dedans ou respecte certaines règles théoriques »

Ton inspiration vient-elle aussi d’autres musiques ?

Le style que j’écoute le plus à part le rap, c’est la musique classique. Debussy, Chopin et Érik Satie m’ont marqué. Chopin et Satie ont beaucoup été samplé, surtout dans le rap US. J’ai une musique en tête de G-Eazy où la prod est un sample de Gnossienne No. 1. En rock je suis plus sur la période des Pixies et de Nirvana. Ça ne s’en ressent pas du tout dans mon EP ; mais dans d’autres sons que j’ai pu faire, j’aime bien jouer des lignes de basse ou de guitare inspirées de ce que l’on pourrait trouver dans le grunge. J’aime aussi le Jazz, et notamment Chet Baker, qui se rapproche du minimalisme de Satie.

Tu as une grande culture musicale !

C’est très important d’être curieux et de surprendre en incorporant des influences assez diverses. Ma mère m’a transmis le goût de la musique et de la littérature. Elle m’a aussi inscrit à ma demande à des cours de solfège pendant mon enfance. Le solfège a éduqué mon oreille, mais c’était trop scolaire pour moi… Je préfère la création et l’improvisation, je fais tout au ressenti ! Satie créait de la musique très simple et permettait à des non initiés de jouer ses morceaux… Je suis un peu de cette école-là ! Mon son est bon s’il me fait danser et ressentir des émotions, pas s’il y a de la connaissance dedans ou respecte certaines règles théoriques. La chose la plus importante, c’est d’écouter son cœur.

Interview. Blue Fuji, la nouvelle pépite du rap dijonnais
©vincentarbelet

Côté littérature, quels sont tes auteurs préférés ?

La précision psychologique des personnages et la contemplation dans les œuvres de Marcel Proust m’ont beaucoup marqué. L’écrivain tchèque Bohumil Hrabal, pour sa narration prosaïque et détachée, ainsi que son humour pince-sans-rire, est l’un de ceux qui m’ont le plus influencé. Je suis un peu comme ça aussi… Je lisais beaucoup Jules Verne quand j’étais petit, et j’apprécie George Orwell.

Tu parles de contemplation. C’est ce que l’on retrouve aussi bien dans les sons SoundCloud et cloud rap, que dans ton rap !

Je suis tout à fait d’accord. Au mot contemplation on pourrait associer celui de poésie. Certains ont du mal avec le cloud rap parce qu’ils trouvent que les paroles y « manquent de sens ». Dans ce genre, les paroles se ressentent plus qu’elles s’analysent. Elles amènent des émotions… Il ne faut pas forcément les intellectualiser !

Des artistes visuels ont pu inspirer ta DA ?

Oui, notamment l’univers onirique de Michel Gondry. Il a réalisé Eternal Sunshine of the Spotless Mind avec Jim Carrey, mais aussi beaucoup de clips. C’est lui qui avait adapté L’Écume des Jours de Boris Vian au cinéma. J’ai aussi en tête des peintures de Van Gogh. C’est tout un ensemble de choses, y compris des discussions… Tout est inspirant pour ma musique.

Ton dernier EP vient de sortir. Peux-tu nous en dire quelques mots ? 

L’EP est composé de quatre titres. Il plaira à ceux qui ne sont pas forcément accoutumés au rap avec des sons un peu plus chantés ; et les amateurs de rap sauront trouver leur compte aussi. Le projet est assez complet.

Le titre de ton EP rend hommage à un artiste que tu apprécies particulièrement ! 

Le projet s’appelle Jeune Hokusai : Jeune car je suis un éternel apprenti de la vie et de l’art ; Hokusai car c’est l’artiste complet que je souhaiterais devenir. J’ai une fascination pour lui et ses estampes. Il a croisé la tradition, la technique, l’expérimentation et la modernité en important le bleu de Prusse dans son travail, ce qui ne se faisait pas du tout à l’époque au Japon. J’aime les contrastes qu’on retrouve dans son œuvre, notamment entre les vagues en mouvement et la sérénité du Mont Fuji. Plus je me documente sur sa vie, son travail et son époque, plus cela m’inspire.

Le foot est aussi dans le thème de ton dernier projet musical avec ce gimmick « Je mets des petits ponts, je ne mets pas de costard ». Le ballon rond compte-t-il autant pour toi ?

Je n’ai jamais fait de foot en club parce que ma mère ne voulait pas, mais je joue beaucoup au city ou sur grand terrain aujourd’hui. Quand j’étais petit, l’un de mes grands frères me parlait tout le temps de foot, d’ailleurs plus pour l’aspect esthétique, les beaux maillots, les belles chaussures, les beaux gestes… Dès l’âge de trois ans, je n’avais que ça en tête. Même à l’école il y avait ce truc de collectionner et d’échanger les cartes Panini. Quand j’étais petit, il y avait l’épopée européenne de l’OL à la télé… Je regardais les compilations des coups francs de Juninho.

Interview. Blue Fuji, la nouvelle pépite du rap dijonnais
©vincentarbelet

Quel est ton poste au foot ? 

Ailier gauche ! Comme je suis droitier, le fait d’être sur la gauche permet de m’ouvrir le terrain. Je cours beaucoup et tente des gestes créatifs. Je suis plus attaquant que défenseur, et sur l’aile gauche, ça me correspond parfaitement.

Tu as des idoles dans le foot ? 

Pour l’extravagance, le style et le côté provocateur j’aimais beaucoup Djibril Cissé. Quand tu es petit, tu es tout de suite attiré par ce joueur et tu veux devenir comme lui. Après, comme pour beaucoup de Français, l’idole c’est Zidane. Je me rappelle de la finale de la Coupe du Monde en 2006 durant laquelle il met le coup de boule… C’est la première fois que j’ai pleuré pour du foot… Mon coeur n’est pas encore réparé depuis ce jour-là ! C’est plus rétrospectivement que je me suis documenté sur sa carrière et regardé ses matchs.

En tant que Dijonnais, quel joueur du DFCO t’as particulièrement marqué ?

Je retiens un nom qui fait l’actualité aujourd’hui : Pierre Lees-Melou. Dans l’histoire du DFCO, c’est l’un de mes joueurs préférés. Il est assez discret mais hyper fort sur le terrain. Il apporte toujours à l’équipe et prend de plus en plus d’ampleur dans les clubs où il passe. Ce n’est pas une star, dans le sens où il ne fait pas beaucoup de bruit, mais c’est aussi ça une star pour moi. Il est impressionnant. Je l’ai découvert au DFCO quand j’allais voir les matchs. 

Tu as d’ailleurs réalisé un shooting photo à Gaston Gérard et annoncé un partenariat avec le DFCO.

Je vis à Dijon depuis huit ans, c’est ma ville ! Ce partenariat avec le DFCO est une fierté. Je suis trop content de pouvoir en porter le maillot grâce à ma musique. Je leur en suis reconnaissant !

Interview. Blue Fuji, la nouvelle pépite du rap dijonnais
©vincentarbelet

En quoi consistera-t-il ? 

À partir de décembre, je ferai une série de concerts et je réaliserai des petits happenings comme des concours de jongles. Des cadeaux offerts par le DFCO seront à gagner !